
« Les preuves fiables disponibles ne soutiennent pas l’utilisation de l’ivermectine pour le traitement ou la prévention du Covid-19 en dehors d’essais contrôlés randomisés (ECR) bien conçus », estiment les auteurs d’une revue « Cochrane », publiée le 28 juillet.
Pour évaluer l’efficacité de ce traitement antiparasitaire en prévention, sur la mortalité, la maladie et la durée de l’infection chez les personnes atteintes de Covid-19, les résultats de 14 ECR incluant 1 678 participants et comparant l’ivermectine à l’absence de traitement, à un placebo ou à des soins standards ont été analysés : 9 études portaient sur des patients hospitalisés avec une forme modérée de la maladie, 4 sur des sujets pris en charge en ambulatoire pour une forme
égère et une étude s’est penchée sur son utilisation en prévention d’une infection par le SARS-CoV-2 (prophylaxie post-exposition). Les doses d’ivermectine et la durée du traitement variaient selon les études.
Un manque de preuves de bonne qualité
La revue n’a pas permis de confirmer ou d’infirmer les effets de l’ivermectine sur le nombre de décès, sur l’aggravation ou l’amélioration de l’état des patients et sur les effets indésirables, par rapport au placebo ou aux soins habituels. « Le manque de preuves de bonne qualité sur l’efficacité et l’innocuité de l’ivermectine découle d’un groupe d’études qui se compose principalement de petits ECR insuffisamment puissants avec une qualité globale limitée en ce qui concerne la conception, la conduite et la notification des études », expliquent les deux principales auteures de cette revue, Maria Popp et Stephanie Weibel, annonçant d’ores et déjà une mise à jour de la revue quand les résultats de 31 essais en cours seront disponibles.
« Cette revue confirme les conseils précédemment émis par l’OMS, l’EMA et la FDA selon lesquels cette molécule ne doit être utilisée que dans le cadre d’un essai randomisé et ne doit pas être utilisée pour le traitement de routine ou la prévention de Covid-19 », souligne le Pr Stephen Evans, pharmacoépidémiologiste à la London School of Hygiene & Tropical Medicine, auprès de l’agence britannique Science Media Center. « Bien qu’il faille attendre le résultat de l’essai Solidarity pour confirmer, il semble hautement improbable que ce médicament puisse ou doive être réutilisé pour traiter l’infection par le SRAS-CoV2. La poursuite de son utilisation hors AMM devrait donc être considérée comme inacceptable à l’heure actuelle », ajoute le Pr Stephen Griffin, de la Faculté de médecine de l’université de Leeds.
Un effet immunomodulateur et non antiviral, selon l’Institut Pasteur
Des travaux menés en laboratoire ont pourtant suggéré l’intérêt de l’ivermectine face au Covid-19. Le 12 juillet, une équipe de l’Institut Pasteur publiait dans « EMBO Molecular Medicine » des résultats encourageants dans un modèle animal. Chez des hamsters infectés par le SARS-CoV-2, les chercheurs ont montré que des doses standards d’ivermectine (400 µg/kg) prévenaient la détérioration clinique, réduisaient le déficit olfactif et limitaient l’inflammation des voies respiratoires supérieures et inférieures.
« De manière surprenante, nous avons observé que le traitement à l’ivermectine n’a pas limité la réplication virale, les modèles traités et non traités présentaient des quantités similaires de charge virale dans la cavité nasale et dans les poumons. Nos résultats révèlent que l’ivermectine possède un effet immunomodulateur et non antiviral », commente, dans un communiqué, Guilherme Dias de Melo, chercheur à Pasteur et premier auteur de l’étude.
Par Elsa Bellanger – article publié le 29/07/2021
Article référence : Popp M, Stegemann M, Metzendorf M-I, Gould S, Kranke P, Meybohm P, Skoetz N, Weibel S. Ivermectin for preventing and treating COVID-19. Cochrane Database of Systematic Reviews 2021, Issue 7. Art. No.: CD015017. DOI: 10.1002/14651858.CD015017.pub2. www.cochranelibrary.com
Commentaire : Pr A.Djebbar
L’ivermectine est un traitement antiparasitaire utilisé et commercialisé depuis 1970 par le laboratoire Merck . Il s’agit à la base d’un médicament de la gamme des anthelminthiques . Il permet donc de soigner diverses maladies causées par des parasites, des acariens et des insectes. Il est notamment indiqué dans certaines affections parasitaires gastro-intestinales mais aussi dans la gale, la rosacée et même les poux du pubis, ainsi que de graves maladies causées par des vers tropicaux, comme la cécité des rivières.
Ce médicament a été plébiscité à tord par des hommes politiques , des influenceurs, voir surtout et bien inconsciemment par les différents relais des réseaux sociaux qui vantaient » un remède miracle contre ce mal du siècle qu’est la Covid-19 « . Ce qui a entrainé un engouement irréfléchi sur le terrain par un certain nombre de pays tels que l’Inde, l’Indonésie , le Brésil, l’Afrique du Sud, le liban. ….Voir aux Philippines, où le président Rodrigo Duterte aurait lui même fait pression sur le régulateur des médicaments pour que l’ivermectine soit approuvée comme traitement contre le coronavirus (Voir L’Express ).
Les Etats Unis ne sont pas restés à l’écart. La ruée vers l’automédication dans ce pays, voir le grand amalgame entre la médication animalière et humaine avait engendré beaucoup de complications , voir une hausse de mortalité dans la population ayant consommé cette molécule , d’autant qu’il existe beaucoup d’interactions médicamenteuses néfastes comme la contre-indication majeure avec l’association à des anticoagulants utilisés dans le traitement de la Covid 19.
De nombreux scientifiques, mais aussi l’Organisation mondiale de la santé (OMS) qui disait « Notre recommandation est de ne pas utiliser l’ivermectine pour des patients atteints du Covid-19. Ceci s’applique quel que soit le niveau de gravité ou de durée des symptômes » . La Food and Drug administration Américaine ( FAD) qui avertissait …. « Utiliser l’ivermectine pour traiter la Covid-19 peut être dangereux voire mortel. La FDA n’a pas approuvé le médicament dans cette indication » . En France, l’ANSM a jusqu’à présent déconseillé l’ivermectine dans le traitement du Covid-19. « Les preuves fiables disponibles ne soutiennent pas l’utilisation de l’ivermectine pour le traitement ou la prévention du Covid-19 en dehors d’essais contrôlés randomisés (ECR) bien conçus », estimaient encore les auteurs d’une revue « Cochrane », publiée le 28 juillet dernier. Il en est de même des agences sanitaires de beaucoup de pays, qui ont tous souligné l’absence de preuves crédibles d’un impact positif de l’ivermectine contre le coronavirus et qui n’ont cessé depuis d’attirer l’attention sur la dangerosité de ce médicament dans le traitement de cette virose.