George TJ et coll. : Acute kidney injury increases mortality after lung transplantation. Ann Thorac Surg 2012 ; 94 : 185-92.
Une dysfonction rénale aiguë complique fréquemment la transplantation pulmonaire ; elle survient dans 25 % à 62 % des cas sans que l’on en connaisse précisément la physiopathologie malgré les nombreuses hypothèses proposées pour l’expliquer.
Chez 5 % à 16 % des transplantés pulmonaires, l’atteinte rénale est suffisamment sévère pour nécessiter secondairement une thérapeutique de substitution de la fonction rénale. Mais quelle que soit sa gravité, la dysfonction rénale aiguë s’associe, sans qu’on en connaisse la raison, à une augmentation significative de la morbidité, mais aussi de la mortalité qu’elle peut multiplier par 4.
Il faut enfin rappeler que l’insuffisance rénale chronique est particulièrement fréquente chez les transplantés pulmonaires puisqu’elle peut toucher 90 % de cette population ; elle risque de s’aggraver au cours de l’évolution obligeant à recourir à une thérapeutique de substitution de la fonction rénale.
Ceci étant posé, TJ. George et coll. ont repris ce problème à travers la plus importante série de transplantations pulmonaires jamais publiée. En effet, leur étude a analysé rétrospectivement les données des 12 108 patients qui ont bénéficié d’une transplantation pulmonaire au sein de l’United Network for Organ Sharing entre 2001 et 2011 ; ils ont été stratifiés en fonction de la valeur de leur fonction rénale préopératoire évaluée par la formule MDRD (Modification of Diet in Renal Disease formula) : > 90, 60 à 90 et < 60 ml/min-1/1.73m-2. La transplantation pulmonaire a été suivie d'une thérapeutique de substitution de la fonction rénale chez 655 patients, soit 5,51 %.
Comparés aux transplantés restés indemnes de cette complication, les transplantés qui ont été atteints de dysfonction rénale aiguë post-transplantation ont eu une survie significativement moindre : 76,0 % versus 96,7 % (p < 0,001) au 30e jour ; 35,8 % versus 85,5 % (p < 0,001) à un an et 20,0 % versus 56,4 % (p < 0,001) à 5 ans.
En analyse multivariée, ces différences ont persisté tout au long de l’évolution : au 30e jour (hazard ratio [HR] = 7,98 [6, 16 à 10,33] ; p < 0,001), à 1 an (HR = 7,93 [6,84 à 9 19] ; p < 0,001) et à 5 ans (HR = 5,39 [4,75 à 6,11] ; p < 0,001).
L’état de la fonction rénale préopératoire était un facteur prédictif important de la nécessité ultérieure d’une thérapeutique de substitution de la fonction rénale : pour un débit de filtration compris entre 60 et 90, l’odds ratio [OR] était de 1,42 [1,16 à 1,75] (p = 0,001), et pour un débit de filtration < 60, l'OR était de 2,68 [2,07 à 3,46] (p < 0,001).
En conclusion, la survenue d’une dysfonction rénale aiguë dans les suites d’une transplantation pulmonaire est responsable d’un recours à une thérapeutique de substitution de la fonction rénale dans 5,51 % des cas, ce qui augmente de façon drastique la mortalité à court et long terme. Entre autres variables, la valeur de la fonction rénale préopératoire peut permettre de prédire la nécessité d’un recours ultérieur à une thérapeutique de substitution de la fonction rénale. De ce fait, elle pourrait être utilisée pour identifier ceux des transplantés pulmonaires qui y sont le plus exposés.